À la rencontre de membres du personnel – Entrevue avec Marie-Louise Nkwaya

Lors de mon passage à Kangirsuk en septembre 2022, on m’a dit qu’il fallait absolument que je rencontre Marie-Louise Nkwaya. Cette dernière, une enseignante en mathématiques et sciences au secondaire (secteur français) est récipiendaire du prix Evie Ikidluak pour ses 11 années de service.
Or, alors que je croyais avoir trouvé le moment opportun pour lui parler, elle était très occupée… à la cuisine!
« Tellement occupée? C’était juste du sushi. C’est moins que quand je cuisine comme 3 repas différents. Oui, parfois je fais 3 repas différents. […] J’essaie de faire le maximum de repas pour que quand les gens du village viennent, chacun ait de quoi manger ».
Nourrir le ventre et nourrir la motivation
Issue d’une famille nombreuse, Marie-Louise est habituée à de grands repas, bien entourés. Et de toute évidence, cuisiner est une de ses passions. Sans le dire explicitement, cette passion m’apparaît comme une bonne métaphore de sa vision de l’éducation.
« Ma grand-mère disait que ‘quand le ventre est plein, les bonnes paroles sortent de la bouche’ »
À l’instar de les nourrir avec de la nourriture qu’elle prépare de ses mains, Marie-Louise souhaite alimenter la motivation et contribuer au succès de ses élèves par son enseignement.

Mes élèves sont très très intelligents. Ils sont très talentueux. Ils ont cette ressource que la nature leur a donnée. Et j’aimerais, si c’était comme un interrupteur là, comme la lumière qu’on allume là, si je peux seulement appuyer dessus, les allumer.

Pour Marie-Louise, tout mettre en œuvre pour contribuer à la réussite de ses élèves, ses « petits cœurs », est une affaire personnelle. Et les ambitions, idées et projets ne manquent pas pour y arriver.
Elle aimerait notamment organiser un voyage au Cameroun pour des élèves et des volontaires du village.
« Quand j’ai raconté mon histoire à mes élèves, ils étaient tellement motivés! […] Je voudrais les amener au Cameroun pour qu’ils voient d’autres réalités. Comment les enfants se battent… souffrent… pour aller à l’école ».
Mais pourquoi mettre autant d’énergie à motiver ses élèves?
« J’aimerais venir ici, quand je serai avec ma canne, trouver des élèves à ma place, en train d’enseigner. […] C’est mon souhait de voir ces enfants au plus haut niveau de la barre. J’aimerais qu’ils soient, pourquoi pas, les ministres, les procureurs, les patrons… que tous les gens n’aient plus besoin d’aller à Montréal. »
L’esprit de communauté et de partage (et l’amour du poisson!) fut à l’origine du coup de foudre de Marie-Louise pour Kangirsuk. Ces éléments lui rappellent sans conteste son Cameroun natal – pays qu’elle souhaite regagner un jour.


Je sais plus comment je vais faire pour quitter. Parce que [mes élèves], ils me disent toujours, ‘est-ce que tu veux encore partir?’ J’ai dit ‘oui, je vais rentrer au Cameroun.’ Puis ils me disent ‘s’il te plaît, attends, quand je vais graduer, c’est là où tu vas partir’. Je dis ‘OK, je vais attendre’.